ou les emprunts de la langue grecque…
Nous vous proposons d’aborder succinctement l’étymologie avec quelques informations sur la formation des mots français à partir du grec. Celles-ci sont extraites du cours de Monsieur Jean-François Thomas, professeur à l’Université Paul Valéry à Montpellier.
C’est à partir du XVI° siècle que de nombreux mots sont empruntés à la langue grecque. Environ 2500 mots d’origine grecque composent la langue française, elle-même issue à 87% de mots latins et grecs. Le lexique français comprend 100 000 mots mais les dictionnaires les plus complets présentent entre 60 000 et 80 000 mots. Du côté grec le lexique est aussi fourni que le français. L’emprunt désigne en linguistique l’intégration du mot étranger dans la langue du locuteur. En général le mot est assez proche dans sa forme au mot d’origine (ex : amande, câpre, huître, chameau, estomac, encéphale, traumatisme). L’emprunt permet également de créer un mot composé dans lequel seul l’un des termes peut être emprunté au grec (ex : aéroclub, antalgique). La production de tels mots est toujours vivante, c’est-à-dire que l’on utilise encore des mots issus du grec pour créer des mots nouveaux et répondre aux besoins de la langue. La civilisation et la culture grecques ont livré des savoirs étendus inconnus dans d’autres civilisations. Ce fut le cas par exemple sous le règne d’Alexandre le Grand où la découverte du Moyen Orient permit de connaître des écosystèmes riches et différents de ceux de la Grèce continentale.
Quelques exemples :
Végétaux : – agavé => agave; amygdalon => amande; arakhidua => arachide ; kapparis=> câpre ; karoton =>carotte ….
Animaux – phallaina => baleine ; khamaillon => caméléon ; kamêlos => chameau …
Corps humains et médecine – artère => artéria ; bras => brakhion ; bronche=> brogkhia…
Vie pratique – boîte => buxis ; cathédra => chaise ; Krabbatos => grabat »…
Toponymes – Leucate = la blanche, Nice = la victorieuse, Naples = la ville neuve, Antibes = la ville d’en face, Grenoble = la ville de Gratien, Tripoli = 3 villes. Le mot « pol » désigne la ville (cf ; police, politique).
Des évolutions sémantiques sont possibles sur une longue période (évolution diachronique) ou sur une période plus courte (évolution synchronique) – Il peut en résulter une différence de sens entre le mot grec et le mot français. Ainsi le mot grec « idiotes » qui signifie tout d’abord simple particulier par rapport à magistrat voit son sens évoluer pour prendre celui de non spécialiste d’où finalement le sens d’ignorant, sans éducation et personne qui manque d’intelligence, c’est-à-dire idiot.
L’origine grecque peut être altérée par l’évolution phonétique (ex : persil, salpêtre, pétrole). Ces mots reposent sur le nom grec de la pierre « petros » => « petroleum » = huile de pierre vue par les troupes d’Alexandre en Irak où l’huile noire affleure dans les sables du désert. Le persil vient du mot petroslinon, c’est-à-dire l’herbe aromatique qui pousse à l’état sauvage entre les pierres.
Mots composés du français constitués sur des bases grecques
Allergie => « all » = autre et « ergie » = efficacité
Mélomane => « -mane » = qui s’attache à et « mélos » = chant
Gastéropode qui confond son estomac « gaster » et ses pieds « péd- »
Des mots français sont construits avec un premier élément ou préfixe emprunté au grec
« a-» / « an- » => athée, acéphale, anarchiste, amoral, anémié
« anti- »=> antisémite, antidote
« bio-» = vie => biologie
« chrono- » = temps => chronologie
« démo » = peuple ; « dys » = mauvais ; « eu » = bon ; « hémi » = à demi ; « homo » =même ; « hyper » = au-dessus ; « macro » = grand ; « micro »=petit ; « mono »=seul ; « néo »=nouveau ; « oiko »et « éco » = maison ; « péri »= autour ; « pava » = contre.
Des mots français sont construits avec un second élément (suffixe) emprunté au grec
« -algie » = souffrance ; « -crate » =gouvernement ; « -drone » = course, « -gone »=angle ; « -iatre » = qui soigne ; « -logie » = parole, science ; « -phage » = qui mange ; « -phile » ; « -phobe » ; « -phore » ; « -pole » ; « -pode » ; « -scope » ; « -thérapie » ; « -thèque » ; « -tome » = couper.
Il existe une correspondance entre des mots formés avec le grec ou avec le latin
Grec | latin |
Hémicycle | Demi-cercle |
Monochrome | unicolore |
polymorphe | multiforme |
tétragone | quadrangulaire |
héliotrope | tournesol |
Micro- | Mini- |
Méga- | Maxi- |
Hypo- | Sub- |
Hyper- | Super- |
D’une manière générale les mots issus du grec sont plus nombreux dans les matières techniques qui résultent de la transmission des savoirs de l’Antiquité. Ils sont facteurs de précision et de concision (ex : rachialgie = douleur le long de la colonne vertébrale).